vendredi 17 février 2017

Juste la mer à boire

Eau salée entre deux -M-, Mexico qui m'appelle et Marseille qui me retient, le vent chaud de l'une contre les amarres de l'autre.
Eau salée  qui revient parfois le long de mes joues, on ne les embrassera plus et cette idée est si saugrenue,  je n'y crois pas.
Déjà il faut apprendre à oublier des terres reconnues de personne. L'oubli avant le regret. Une sage posture, dit-on.

Ce n'est que la mer à boire. Si nous la buvions à deux, peut-être se viderait-elle plus vite?
Mais la mer comme les larmes est salée, comme elles elle n'étanche pas la soif et ne te laissera que plus sec et  saoul si par hasard tu te risquais à l'avaler. La mer comme les larmes est infinie et de fond nous n'apercevrons point. Moi je n'ai jamais touché le bout du bout des fonds marins.

A l'intérieur de nous aussi il y a la mer et son petit -m- se promène dans mes veines avec les autres plus grands, les -M- majuscules; je sens leur farandole sous ma peau. Je sens que la danse a commencé, elle suit celle de mon squelette -là-bas on s'y connaît bien, là-bas nous saurons déjà les pas, tu verras.
Viens, approche, ne t'effraie pas, ce n'est que de l'eau, de l'eau et du sel, de l'eau et du sang , ce n'est que l'océan entre nos continents d'os, l'océan et la mer, à boire ou à naviguer, ce n'est rien. Rien, tant que tranquilles nous dormirons. Les routes des rêves, tu sais, connaissent les raccourcis des possibles.



Pablo Neruda, Libro de las preguntas